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September 7, 2023   ChinAfrica
Semer les graines de l'autonomie

PAM;Riziculture;Côte d’Ivoire;Techniques;Dynamiser;Alliance pour une révolution verte en Afrique

Le partage de savoir-faire depuis la Chine ambitionne de consolider la filière rizicole en Afrique.

Des membres d’une délégation africaine visitent des installations de recherche sur les semences de riz dans le district de Funing, à Yancheng, dans la province du Jiangsu, le 16 juin. (BUREAU DU PAM EN CHINE) 

Lors de son séjour en juin dans la province du Jiangsu, dans l’est de la Chine, Sia Evelyne Koudounon, à la tête d’un syndicat agricole du village guinéen de Guegueckoce, a découvert avec étonnement les pratiques chinoises relatives à la riziculture. Elle était en Chine dans le cadre d’un programme d’échanges centré sur la filière rizicole. 

« Tout ce que nous avons observé, de la culture à la transformation en passant par l’emballage et la vente, est d’une qualité irréprochable », confie-t-elle à CHINAFRIQUE

Cette visite s’inscrivait dans le cadre d’un atelier mis en place après le lancement de l’Initiative de développement de la filière rizicole Chine-Afrique en mars 2021. Cette initiative est portée par le Centre d’excellence pour la transformation rurale du Programme alimentaire mondial (PAM) et le Centre d’excellence régional contre la faim et la malnutrition. Elle est issue d’une démarche du Centre mondial de développement Sud-Sud visant le partage de savoirs, l’apprentissage collaboratif, ainsi que le transfert technologique pour booster la filière rizicole entre la Chine et les pays africains. 

Saluant l’implication des femmes dans cette filière, des représentantes agricoles d’Afrique ont été conviées à cet atelier. Mme Koudounon faisait partie de ces élues, et elle est repartie enrichie de cette expérience. 

« Bien que nous ne puissions reproduire à l’identique ce que nous avons vu en Chine, nous sommes déterminées à appliquer certaines de ces techniques à notre échelle, au sein de nos communautés, coopératives et syndicats », conclut-elle. 

Aboubakary Traoré, directeur du Département d’appui au développement du riz à l’Agence nationale ivoirienne pour le développement de la chaîne de valeur du riz, lors d’un séminaire sur la chaîne de valeur du riz Chine-Afrique à Wuxi, dans la province du Jiangsu, le 20 juin. (BUREAU DU PAM EN CHINE) 

Une source alimentaire essentielle 

L’initiative vise à renforcer la sécurité alimentaire en Afrique face aux taux persistants de malnutrition. Hameed Nuru, directeur du Bureau mondial du PAM à l’Union africaine, souligne l’urgence d’atteindre les objectifs fixés par la Déclaration de Malabo d’ici 2025 et l’Objectif de développement durable n°2 d’éradiquer la faim d’ici 2030. 

Les défis tels que la pandémie de COVID-19 et la crise russo-ukrainienne ont mis en exergue la fragilité de la sécurité alimentaire africaine. « Il est impératif d’établir ou de restaurer les greniers de l’Afrique, et le riz doit y jouer un rôle central », affirme-t-il. 

M. Nuru rappelle que le riz, céréale indigène, est cultivé en Afrique depuis plus de 3 000 ans. Il est devenu la seconde source calorique majeure du continent, cultivé dans 43 pays et fournissant des revenus à près de 35 millions d’agriculteurs. Avec l’évolution des goûts, la demande de riz s’accroît, et l’Afrique compte désormais pour 32 % des importations mondiales. « Le riz est essentiel à la lutte contre la faim en Afrique », insiste-t-il. 

Toutefois, la filière rizicole africaine rencontre de nombreux défis, allant de la nécessité d’innover en matière de technologie, de semences et d’engrais à la gestion des nuisibles et des maladies, sans oublier les impacts du changement climatique. Des efforts sont également requis pour optimiser la gestion post-récolte, la transformation du riz et la création de valeur. 

Le PAM œuvre pour dynamiser cette filière en promouvant des partenariats, en diffusant les avancées de la recherche et des technologies et en renforçant le rôle des petits agriculteurs dans la riziculture, entre autres initiatives. Un accent particulier est mis sur l’intégration des jeunes et des femmes. L’apport de savoir-faire du premier producteur mondial, la Chine, s’avère primordial. 

Des membres d’une délégation africaine visitent des installations de stockage de céréales à Wuxi, dans la province du Jiangsu, le 20 juin. (BUREAU DU PAM EN CHINE) 

L’expertise chinoise 

Agnes Kalibata, à la tête de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique, a mis en avant l’importance pour l’Afrique de s’inspirer des expériences asiatiques, notamment chinoises, pour diminuer les pertes post-récolte du riz. Elle estime que ces pertes représentent entre 20 et 40 % de la production en Afrique. 

Aboubakary Traoré, directeur du Département d’appui au développement du riz à l’Agence nationale ivoirienne, a identifié des opportunités de collaboration avec la Chine dans la chaîne de valeur du riz, après son voyage à Sheyang en juin. Cette visite a révélé des possibilités de collaboration étendues dans divers domaines. 

Au-delà de l’adoption de technologies avancées et d’équipements modernes, dont le big data, M. Traoré a souligné l’importance de la coopération en matière d’irrigation pour le riz. « Nos terrains agricoles manquent majoritairement de systèmes d’irrigation et de conservation de l’eau aussi élaborés que ceux de la Chine. Notre agriculture reste essentiellement tributaire des aléas climatiques », note-t-il. 

Il a été particulièrement marqué par la manière dont la Chine a su valoriser les petits agriculteurs pour accroître la production rizicole. En Côte d’Ivoire, la majeure partie de l’agriculture repose sur de petites exploitations, et près de 80 % des acteurs de ce secteur sont de petits producteurs. « Nous souhaitons emprunter à la Chine cette méthodologie, afin que nos petits producteurs bénéficient d’un soutien économique et technique optimal, dans le but d’améliorer ensemble notre rendement rizicole », souligne-t-il. 

Pour favoriser l’échange de savoir-faire, le PAM a introduit une plateforme en ligne dédiée à la coopération Sud-Sud, offrant des ressources sur divers sujets, dont le riz. Selon M. Nuru, ce partage de connaissances est bien plus précieux que n’importe quelle aide matérielle. « L’Afrique recherche des opportunités et de l’expertise pour se développer de manière autonome. La véritable générosité réside dans la capacité à rendre autonome. Nous sollicitons l’expertise chinoise car elle connaît notre situation, ayant elle-même traversé des défis similaires. Aujourd’hui, elle peut nous épauler », conclut-il.